#142 Lundi 26/07/2021

Sacrement de l'onction des malades
Sacrement de l'onction des malades

Chers amis,

 

Nous sommes toujours dans une période bien étrange, avec à la fois des mesures de restriction, des contaminations relativement importantes pour le Cambodge, et une vie quotidienne qui, à bien des égards, se poursuit presque comme si de rien n'était...

 

Bien sûr, presque tout le monde porte un masque, et vous devez scanner un QR code et faire contrôler votre température quand vous entrez dans de nombreux lieux, bien sûr, les autorités annoncent régulièrement que toutes les personnes qui sont passées tel jour dans tel commerce doivent toutes aller se faire tester, car il y a eu un cas positif, bien sûr, de nombreux types de lieux sont toujours fermés jusqu'à nouvel ordre... mais c'est un peu comme si tout cela devenait normal... il y a une accoutumance à toute cette situation qui est inévitable, et en même temps un peu inquiétante. Dans les centres commerciaux, et aussi tout simplement dans les rues de Phnom Penh, la multiplication des fermetures de commerces (boutiques de vêtement, restaurants,...), surtout les commerces qui visaient la clientèle des touristes et des expatriés, montre bien que la situation est loin d'être normale, et est loin de s'améliorer. Certains commerces qui semblaient avoir les reins suffisamment solides (notamment certains franchisés de grandes marques internationales) et tenaient bon jusque-là sont en train de jeter l'éponge les uns après les autres.

 

Activités pastorales

Les quelques activités qui sont possibles se poursuivent, comme par exemple la préparation au mariage. Pour ce qui est des baptêmes, nous faisons une pause pour le moment.

 

Nous avons aussi constaté qu'il y avait une inquiétude chez nombre de nos anciens, à Areyksat, qui ne peuvent plus venir à l'église depuis plusieurs mois maintenant. Ils ont peur de mourir sans avoir reçu les sacrements de l'Église, surtout pour ceux qui vivent avec des pathologies lourdes. En même temps, dans un contexte épidémique, c'est délicat de faire du porte-à-porte en allant visiter des personnes fragiles, en ayant toujours peur de transmettre le virus. Aujourd'hui, une proportion importante de la population est vaccinée, et pour ne pas laisser nos anciens dans l'angoisse, nous avons lancer une "campagne" de célébration du sacrement de l'onction des malades. Jeudi, vendredi et samedi, par groupes d'une dizaine de personnes, ils ont été invités à venir à la messe de 7h, avec possibilité de se confesser et de recevoir le sacrement de l'onction des malades. Ce sont ainsi une bonne trentaine de nos aînés, ou bien de personnes plus jeunes mais atteintes de maladies grave (cancer, SIDA...) qui ont pu se confesser, recevoir le Corps du Christ et l'onction des malades. J'ai fait aussi deux visites à domicile (cf. photo en haut de la page) et une visite dans une petite clinique à quelques centaines de mètres de l'église. À chaque fois, je suis touché par la joie et le soulagement qu'exprime ces personnes.

 

Mardi soir, j'ai aussi été appelé pour aller assister une personne âgée à Po Thom dont on m'a dit qu'elle n'allait sans doute pas vivre au-delà de la nuit. Elle avait reçu la semaine précédente la communion et l'onction des malades, donc "elle était prête". Je me suis rendu sur place, où notre ancienne était entourée de beaucoup de monde... Nous avons prié avec elle, et pour elle. J'avais cependant le sentiment qu'elle n'était pas arrivée au bout de son chemin sur cette terre... Quelques heures plus tard, dans la soirée, je recevais un message pour me dire qu'elle était décédée. Mais au petit matin, un nouveau message arrivait sur mon téléphone pour me dire qu'à l'aube, elle s'était réveillée ! Et moi qui m'organisait déjà pour pouvoir faire la sépulture ! Et aujourd'hui, une semaine plus tard, il semble qu'elle soit toujours bien vivante !

 

Hier dimanche, j'ai célébré trois fois l'eucharistie : à 7h à Areyksat, à 8h30 à Po Thom et à 11h avec les francophones à St Joseph, avec à chaque fois déplacement en moto pour aller plus vite. C'était aussi un test pour voir si c'était faisable... et la réponse est que c'est faisable de façon exceptionnelle, mais que je ne peux pas faire ça de façon régulière, car c'est vraiment très fatiguant. Mais en tout cas cela a permis aux francophones d'avoir une dernière messe avant un mois de coupure. Habituellement, il n'y a pas de messe en français en juillet et en août, car la communauté est alors très dispersé. Cette année, compte-tenu du contexte et des liens avec les communautés de Singapour et de Kuala Lumpur, j'ai souhaité prolongé au mois de juillet, mais nous allons maintenant faire une pause en attendant la reprise des activités en septembre.

 

Évolution de l'épidémie de Covid 19

Sur le graphique ci-contre j'ai supprimé les deux courbes des cas en cumulé, car elles "écrasaient" les autres données et empêchaient d'y voir clair. La courbe importante est celle qui est en bleu avec des points, et qui représente les cas "actifs". On ne peut pas être sûr de la véracité des chiffres, mais je pense que cette courbe donne une idée assez juste de la situation.

 

Voilà les chiffres au 25 juillet :

  • nouveaux cas détectés ce jour : 778 (total de cas cumulés : 73.701) et 5.730 nouveaux cas en une semaine.
  • nouveaux décès : 22 (total de décès : 1.305) et 177 nouveaux décès cette semaine
  • nouveaux guéris : 686 (total des guéris : 65.950) et 5.933 nouveaux guéris en une semaine
  • nombre de cas actifs en cours : 6.439 (courbe bleu ciel avec points)

Il y a une sorte de stabilisation de la situation, mais une stabilisation à un point haut. Le nombre de décès quotidien reste très haut, et il semble bien que l'accent soit mis sur la vaccination, mais que le traitement des malades soit défaillant. Le Covid 19 provoque aussi ici des morts par effet de dominos, nous en avons eu un exemple concret dans la communauté chrétienne : un fidèle a été diagnostiqué positif au Covid 19, et a donc été interné dans un centre de quarantaine. Mais à cause d'une insuffisance rénale sévère, il avait besoin d'être dialysé... sauf qu'il n'y a pas d'appareil de dialyse dans la province où il se trouvait, seulement à Phnom Penh, et qu'à cause du fait qu'il était positif au Covid 19, quand bien même il aurait eu l'autorisation d'être transféré hors du centre de quarantaine, aucun établissement hospitalier public ou privé ayant un appareil de dialyse n'a accepté de le prendre en charge. Il est décédé la semaine dernière, faute de dialyse, dans son centre de quarantaine...

 

Renouvellement de ma mission

J'ai eu samedi dernier un long entretien par Zoom avec Mgr Olivier Schmitthaeusler pour faire le point et évoquer le renouvellement de mon contrat. Les deux évêques et moi-même sommes tous les trois d'accord pour poursuivre sur la lancée... à ma plus grande joie. Comme prévu donc, je reste prêtre fidei donum au Cambodge pour trois années supplémentaires.

 

À la semaine prochaine !

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Ouest France | La vie cambodgienne du Père David Journault

Article de Dominique Delaunay.

Pie XII | Lettre encyclique Fidei Donum du 21 avril 1957 sur les missions catholiques notamment en Afrique

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Encyclique "Fidei donum" (texte en français)
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Encyclique "Fidei donum" (texte en anglais)
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Prière à Ste Thérèse de l'Enfant-Jésus et à St François-Xavier d'un prêtre fidei donum

Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face,

toi la petite Carmélite de Lisieux qui voyagea si peu ;

ton cœur ampli d’un amour ardent pour le Seigneur t’a ouverte à l’universelle mission de l’évangélisation.

Du sein du Carmel, ton âme de feu a embrassé dans son intercession tous les missionnaires qui se dépensaient de part le monde pour le salut des âmes en leur faisant découvrir le Christ et sa Bonne Nouvelle.

Aujourd’hui, nous qui quittons un diocèse et une terre où nous sommes enracinés pour prendre notre part de cette œuvre de l’évangélisation ad extra, nous nous confions à ta prière.

Que malgré nos fatigues et nos luttes, nous sachions toujours prendre le temps de l’oraison et de la prière, à ton école et à ton exemple, pour y puiser les forces nécessaires à la mission pastorale, à l’étude de la langue de l’autre et à l’adaptation à la culture du peuple vers lequel nous sommes envoyés.

 

St François-Xavier, compagnon de St Ignace de Loyola, compagnon de Jésus,

toi le défricheur, l’éclaireur, l’ouvreur de voies inédites, tu as expérimenté en ta chair et en ton âme l’exaltation en même temps que la difficulté de la découverte et de la rencontre de terres et de peuples différents.

Toi, le fils de l’Espagne et de l’Europe, tu n’as pas crains de quitter ses rives connues pour affronter l’inconnu des contrées lointaines qui attendaient le témoignage de la foi chrétienne. Tu as mis au service de notre Seigneur tous les talents qu’Il avait déversé en ton âme, pour porter son Évangile aux peuples de l’Asie.

Intercède pour nous auprès de la Trinité Sainte, afin que la force de l’Esprit Saint qui nourrissait ton zèle apostolique habite nos âmes et nous pousse à nous donner, comme toi, pour la plus grande gloire de Dieu, dans la mission au loin.

 

Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus et St François-Xavier, priez pour nous, prêtres du Seigneur, qui donnons ces quelques années au service d’une autre Église, enracinés dans la prière et les dons reçus de nos Églises d’origine.

 

Amen.

 

P. David Journault, septembre 2018

Ouest France | L'au revoir au Père David Journault

M.E.P. | Partir en mission "ad extra"

Par le P. Gilles Reithinger, Supérieur général des Missions Étrangères de Paris

 

Le départ en mission de prêtres ne nous laisse pas indifférent. En effet, alors que les vocations sacerdotales diminuent en France, la question se pose de savoir pourquoi des jeunes gens souhaitent aller au-delà de nos frontières.

Rappelons ici que "La mission de l’Église est animée par une spiritualité d’exode continuel. Il s’agit de « sortir de son propre confort et avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries qui ont besoin de la lumière de l’Évangile" (Exhortation apostolique Evangelii gaudium,n. 20) (4).

 

La mission de l’Église stimule une attitude de pèlerinage continuel à travers les différents déserts de la vie, à travers les diverses expériences de faim et de soif de vérité et de justice. La mission de l’Église inspire une expérience d’exil continuel, pour faire percevoir à l’homme assoiffé d’infini, sa condition d’exilé en chemin vers la patrie définitive, tendu entre le « déjà » et le « pas encore » du Royaume des cieux" nous rappelle le Pape François. 

 

Il s'agit du cœur même de la Mission de l'Eglise d'envoyer les siens, peu importe la distance. L'Eglise répond au commandement du Christ : "Allez, proclamez la Bonne Nouvelle !" Les missionnaires sont envoyés pour proclamer l’Évangile, pas uniquement dans les églises déjà établies ou pour "maintenir des communautés", mais aussi pour être signe de la présence du Christ auprès de ceux qui l'attendent encore. 

 

Ainsi, il ne s'agit pas d'envoyer un missionnaire "de plus" dans un pays, mais d'être témoin de l’Évangile selon le charisme de chacun, dans le respect des cultures et des communautés présentes. Ainsi le missionnaire se laisser façonner par le Christ qu'il rencontre au cœur des cultures d'Orient et d'océan Indien.

 

La Mission est d’abord de porter l’Évangile, d’éprouver la joie de porter l’Évangile en priorité aux pauvres de cœur et abandonnés par la société, et c'est ainsi que "l’Église veut conserver sa fraîcheur, son élan et sa force" (Pape François)

Comme nous y invite le Pape François, chaque prêtre doit être, au nom de l’Eglise, oasis d’accueil, de réconfort, de soutien et d’accompagnement. Des témoins de la présence du Christ quel que soit le niveau de vie matériel ; des témoins de la liberté intérieure que le prêtre souhaite vivre en se donnant au Christ et en allant loin.

 

Concrètement, le missionnaire prend des initiatives, de concert avec les Eglises locales, sans s'inquiéter des résultats immédiats car l’essentiel est d’avancer, le Christ au cœur de sa vie, portant dans son âme et son cœur les personnes que le Seigneur mettra sur sa route.

 

Les missionnaires ne sont ni des philanthropes ni des organisateurs de grands spectacles, mais des témoins du Christ, conscients que les graines d’amour de l’Évangile semées ne peuvent que porter du fruit… en leur temps. 

 

Cet élan et cette force ne réside pas dans le fait de vouloir exporter notre mode de vie ou notre culture, comme nous le rappelait les premières instructions données aux missionnaires en 1659 ; nous voulons nous émerveiller et rendre grâce en découvrant le visage du Christ présent en Asie et dans l'océan Indien, main dans la main avec nos frères et sœurs d'Orient.

 

En même temps, nous ne sommes pas simplement juxtaposés, posés les uns à côté des autres, mais nous sommes appelés à découvrir ensemble la volonté du Seigneur.

 

En partant, on peut se rappeler ces mots de sainte Thérèse, « Jésus, je suis trop petit pour faire de grandes choses, et ma folie à moi, c’est d’espérer ». Et avancer en s'inspirant de sa vie, elle qui avait acquis une réelle maturité au point qu’elle a pu avancer avec certitude et fermeté, non pas en comptant sur ses forces qu’elle connaissait faibles, et dans lesquelles elle n’avait pas confiance, mais en comptant sur la fidélité de Dieu et la puissance de Dieu à l’œuvre dans sa faiblesse, vous irez sur les chemins du monde.

 

Concluons avec les mots de Mgr Budes de Guébriant, supérieur général, qui en 1921 au terme d'une tournée pastorale auprès de ses confrères d'Asie, concluait : "Admiration pour les missionnaires, optimisme pour l'avenir des Missions".

Courrier de la Mayenne | L'Huisserie : le père Journault va retrouver le Cambodge

Article dans le Courrier de la Mayenne de cette semaine. Quelques corrections sur ce qui est écrit :

  • diplômé de Sup de Co La Rochelle (et pas de l'université)
  • la population est à 90% bouddhiste (il y a 9% de Musulmans)

Sinon, c'est globalement bon !

Ouest France | Le père David Journault part au Cambodge

Benoît XVI | Fidei donum : 50 ans d'élan missionnaire

Le 5 mai, Benoît XVI a reçu en audience les participants à la rencontre du Conseil supérieur des Œuvres pontificales missionnaires et au Congrès mondial des Missionnaires Fidei donum qui a eu lieu à Rome du 8 au 11 mai dernier (voir encadré). Ces événements ont été organisés dans le cadre du 50e anniversaire de la Lettre encyclique Fidei donum de Pie XII (a). Dans le discours qu'il a prononcé, le Pape a rendu « grâce pour l'engagement missionnaire en cours » sans dissimuler pour autant « les difficultés qui apparaissent aujourd'hui dans ce domaine ».

 

DISCOURS DU PAPE BENOÎT XVI AUX PARTICIPANTS À LA RENCONTRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DES ŒUVRES PONTIFICALES MISSIONNAIRES  ET AU CONGRÈS MONDIAL DES MISSIONNAIRES "FIDEI DONUM"

Salle Clémentine - Samedi 5 mai 2007

Monsieur le Cardinal, 

vénérés frères dans l'épiscopat 

et dans le sacerdoce, 

chers frères et sœurs,

 

Je suis particulièrement heureux de vous rencontrer après la Célébration eucharistique solennelle présidée par Monsieur le Cardinal Ivan Dias, Préfet de la Congrégation pour l'Evangélisation des Peuples. C'est à lui en premier lieu que va ma pensée cordiale, et je le remercie pour les paroles qu'il m'a adressées en votre nom. J'étends mon salut au Secrétaire et aux collaborateurs du dicastère missionnaire, aux prélats et aux prêtres présents, aux religieux, aux religieuses et à tous ceux qui ont pris part au Congrès qui s'est déroulé ces jours derniers pour commémorer le 50 anniversaire de la Lettre encyclique Fidei donum du Serviteur de Dieu le Pape Pie XII.

 

Cinquante ans se sont écoulés depuis que mon vénéré Prédécesseur, face à l'évolution des temps et à l'apparition sur la scène de l'histoire de nouveaux peuples et de nouvelles nations, avec une sagesse pastorale clairvoyante, comprit que s'ouvraient de nouveaux et providentiels horizons et itinéraires missionnaires pour l'annonce de l'Evangile en Afrique. C'est en effet à l'Afrique  en  particulier  que Pie XII pensait lorsque, avec une intuition prophétique, il imagina ce nouveau "sujet" missionnaire qui, des premiers mots de l'Encyclique, tira le nom de "Fidei donum". Il souhaitait encourager, à côté de formes traditionnelles, un nouveau type de coopération missionnaire entre les Communautés chrétiennes dites "anciennes" et celles qui venaient de voir le jour dans les territoires de récente évangélisation:  les premières étaient donc invitées à envoyer, pour aider les Eglises "jeunes" et révélant une croissance prometteuse, des prêtres afin qu'ils collaborent avec les Evêques du lieu pour un temps déterminé. Le Pape Pacelli écrivait:  "Considérant la foule innombrable de nos fils qui, spécialement dans les pays d'ancienne chrétienté, bénéficient des richesses surnaturelles de la foi et, par ailleurs, la foule plus innombrable encore de ceux qui attendent toujours le message du salut, nous voulons vous exhorter instamment, Vénérables Frères, à soutenir par votre zèle la cause sacrée de l'expansion de l'Eglise dans le monde. Dieu veuille qu'à Notre appel l'esprit missionnaire pénètre plus profondément au cœur de tous les prêtres et, par leur ministère, enflamme tous les fidèles!" (AAS XLIX 1957, p. 226).

 

Le but qui animait le vénérable Souverain Pontife était donc double:  d'une part, susciter en chaque membre du peuple chrétien une "flamme" missionnaire renouvelée et, de l'autre, promouvoir une collaboration plus consciente entre les diocèses d'ancienne tradition et les régions de première évangélisation. Au cours de ces cinq décennies, l'invitation de Pie XII a été répétée à plusieurs reprises par tous mes prédécesseurs et, grâce également à l'élan apporté par le Concile Vatican II, s'est multiplié le nombre de prêtres "fidei donum", partis aux côtés des religieux et des volontaires laïcs en mission en Afrique et dans d'autres régions du monde, parfois au prix de grands sacrifices pour leurs diocèses d'appartenance. Je voudrais ici exprimer mes remerciements particuliers à ces frères et sœurs, dont certains ont versé leur sang pour diffuser l'Evangile. L'expérience missionnaire, vous le savez bien, laisse un signe indélébile chez celui qui l'accomplit et contribue, dans le même temps,  à  nourrir  cette  communion ecclésiale qui fait sentir tous les baptisés membres de l'unique Eglise, Corps mystique du Christ. Au cours de ces décennies, les contacts et les échanges missionnaires se sont intensifiés, également grâce au développement et à la multiplication des moyens de communication, si bien que l'Eglise est arrivée au contact pratiquement de chaque civilisation et de chaque culture. D'autre part, l'échange de dons entre les communautés ecclésiales de fondation ancienne et récente, a constitué un enrichissement réciproque et a favorisé la croissance de la conscience d'être tous "missionnaires", c'est-à-dire tous impliqués, bien que de manière différente, dans l'annonce et le témoignage de l'Evangile.

 

Tandis que nous rendons grâce au Seigneur pour l'engagement missionnaire en cours, nous ne pouvons pas dans le même temps manquer de voir les difficultés qui apparaissent aujourd'hui dans ce domaine. Parmi elles, je me limite à souligner la diminution et le vieillissement du clergé dans les diocèses qui, autrefois, envoyaient des missionnaires dans des régions lointaines. Dans le contexte d'une crise diffuse des vocations, cela constitue assurément un défi qu'il faut affronter. Le Congrès organisé par l'Union pontificale missionnaire pour commémorer les 50 ans de Fidei donum, vous a permis d'analyser attentivement cette situation que vit aujourd'hui l'Eglise. Si nous ne pouvons pas ignorer les problèmes et les ombres, il faut toutefois tourner le regard vers l'avenir avec confiance, en conférant une identité renouvelée et plus authentique aux missionnaires "Fidei donum", dans un contexte mondial qui a indubitablement changé par rapport aux années 50 du siècle dernier. Si les défis lancés à l'évangélisation sont nombreux, nombreux sont aussi les signes d'espérance qui, de toutes les régions du monde, témoignent d'une encourageante vitalité missionnaire du peuple chrétien. Il faut surtout que ne manque jamais la conscience que le Seigneur, avant de quitter les disciples pour le Ciel, en les envoyant annoncer son Evangile dans tous les lieux de la terre, leur a assuré:  "Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28, 20).

 

Chers frères et sœurs, cette certitude ne doit jamais nous abandonner. Le Maître de la moisson ne fera pas manquer les ouvriers pour sa moisson si nous le lui demandons, avec confiance et insistance, dans la prière et dans l'écoute docile de sa parole et de ses enseignements. Je suis heureux, à ce sujet, de répéter l'invitation que Pie XII adressa aux fidèles de l'époque:  "Multiplions, en ces années peut-être décisives pour l'avenir du catholicisme en de nombreux pays - écrivait-il dans son Encyclique -, les messes célébrées aux intentions des Missions:  ces intentions sont celles même du Seigneur, qui aime son Eglise et la voudrait répandue et florissante en tous les lieux de la terre" (AAS, cit., p. 239). Je fais mienne cette exhortation, persuadé que le Seigneur, en répondant à nos incessantes requêtes, continuera de bénir avec d'abondants fruits apostoliques l'engagement missionnaire  de  l'Eglise.  Je  confie  ce souhait à Marie, Mère et Reine des Apôtres tandis que, de tout cœur, je vous donne à vous ici présents et à tous les missionnaires du monde, une Bénédiction apostolique particulière.

La Croix | Les « Fidei donum », prêtres sans frontières

 

Par Martine de Sauto

 

Il y a cinquante ans, Pie XII publiait l'encyclique « Fidei donum » qui invitait les Églises du Nord à établir des relations de collaboration avec les Églises d'Afrique. Signes du « don de la foi », des prêtres sont, depuis, envoyés pour un temps déterminé.

 

Le jour de Pâques 1957, il y a donc un demi-siècle, paraît l'encyclique Fidei donum, adressée par Pie XII aux évêques du monde entier. Elle est publiée dans un contexte de profonds bouleversements. L'Europe, douze ans après la Seconde Guerre mondiale, profite des Trente Glorieuses.

 

En 1947, l'Inde est devenue indépendante. En 1949, la Chine continentale a basculé dans le communisme. En 1954, l'armée française est humiliée à Dien Bien Phu ; la même année commence la guerre d'Algérie. En 1955, 29 pays d'Afrique et d'Asie tiennent la conférence de Bandung, manifestant l'éveil du tiers-monde et sa volonté de se prendre en main. En 1956, à Léopoldville, capitale du Congo belge (aujourd'hui Kinshasa), des intellectuels chrétiens publient dans l'hebdomadaire Conscience africaine un manifeste réclamant l'indépendance à laquelle accéderont aussi, en 1960, les anciennes colonies françaises d'Afrique.

 

À Rome, le long pontificat de Pie XII (1939-1958) est sur le point de s'achever. Dans les Églises dites « jeunes », une certaine impatience se manifeste. En 1956 paraît le livre Des prêtres noirs s'interrogent (Cerf), dans lequel le jeune clergé africain exprime le désir de garder son identité noire à l'intérieur de la foi chrétienne. Le Vatican engage une politique de nominations d'évêques locaux, en Afrique et en Asie.

Une priorité de  Fidei donum : l'Afrique

Que dit alors l'encyclique Fidei donum ? Son titre, « le don de la foi », est expliqué dès la première phrase : « Les incomparables richesses que Dieu dépose en nos âmes, avec le don de la foi, sont le motif d'une inépuisable gratitude… L'esprit missionnaire qu'anime le feu de la charité est, en quelque sorte, la première réponse de notre gratitude envers Dieu : pour la foi que nous avons reçue de vous, voici que nous vous offrons, Seigneur, la foi de nos frères » (n. 1).

 

Suit un appel pressant : « Considérant la foule innombrable de nos fils qui, spécialement dans les pays de vieille chrétienté, bénéficient des richesses surnaturelles de la foi et, par ailleurs, la foule innombrable encore de ceux qui attendent toujours le message du salut, Nous voulons vous exhorter à soutenir par votre zèle la cause sacrée de l'expansion de l'Église dans le monde » (n. 2).

 

Une priorité est ainsi fixée : l'Afrique, qui « s'ouvre à la vie du monde moderne et traverse les années les plus graves peut-être de son destin millénaire » (n. 3). L'accession des peuples aux responsabilités de la liberté politique, l'attrait exercé par le communisme ou le matérialisme athée, la persistance des croyances païennes, le défi de la civilisation technique, la concurrence d'autres confessions plaident, explique le texte, pour un renfort missionnaire.

L'appel invite à porter "le souci de toutes les Églises"

L'appel, qui invite à porter « le souci de toutes les Églises » selon le mot de saint Paul (2 Cor 11, 28) par la prière et par l'entraide, est classique dans ses fondements.

 

Il comporte pourtant des accents nouveaux : insistance sur la nécessité d'accompagner les jeunes Africains étudiant hors de leur pays, proposition d'envoyer à durée limitée des prêtres diocésains, mais aussi des laïcs capables d'apporter aux jeunes Églises d'Afrique leur expérience d'action catholique, dans la perspective d'un « échange de vie et d'énergie » entre toutes les Églises.

 

L'encyclique manifeste aussi une évolution théologique : les évêques doivent se percevoir « solidairement responsables de la mission apostolique de l'Église » : moins de dix ans plus tard, ce sera un thème majeur de l'ecclésiologie de Vatican II ( Lumen gentium, 1964).

 

L'encyclique visait principalement l'Afrique, ne faisant qu'évoquer « les missions d'Asie, d'Océanie, les régions déchristianisées d'Europe et les vastes contrées d'Amérique du Sud ». Quatre années plus tard, en 1961, Jean XXIII demande le même type d'aide pour l'Amérique latine, ce qui donne naissance notamment au Comité épiscopal France-Amérique latine (Cefal).

"Mouvement d'internationalisation"

Depuis lors, des centaines de prêtres européens, couramment appelés « prêtres Fidei donum », sont partis vers ces continents. En 1971, année où la courbe atteint son apogée, ils sont ainsi 564 prêtres diocésains français oeuvrant hors des frontières. Les Italiens et les Espagnols sont alors deux à trois fois plus nombreux. Théoriquement, ces prêtres, qui restent incardinés dans leur diocèse d'origine, partent pour un temps limité afin de favoriser un certain « roulement ». Mais les cas d'enracinement de plus longue durée ne sont pas rares.

 

L'encyclique ne parlait pas spécialement des religieux et religieuses : depuis longtemps en effet, ceux et celles qui se sentaient appelés à servir au-delà des frontières entraient dans un institut missionnaire. Mais, dans les années qui suivirent la publication de Fidei donum, près de 180 congrégations non spécifiquement missionnaires ont fondé des communautés hors de France, dans l'esprit de Fidei donum.

 

« Nous étions à un moment particulier de l'histoire de la vie religieuse, explique Soeur Françoise Schill, chargée du service Vie internationale à la Conférence des supérieures majeures (CSM). Pie XII avait incité les instituts de vie consacrée à engager un profond mouvement de rénovation, qui a transformé la vie religieuse apostolique et donné des appuis nouveaux à sa dynamique missionnaire. Lorsque l'élan de Fidei donum a traversé toute l'Église, des instituts souvent diocésains, qui n'étaient pas missionnaires de tradition, ont entendu ce nouvel appel. Il importe de souligner que, dès le début, ce mouvement d'internationalisation fut de manière incontournable un échange. En 1970, 2 000 religieuses étrangères étaient déjà présentes en France. »

Des échanges sud-sud et sud-nord se sont développés

Du côté des laïcs, interpellés eux aussi par l'encyclique, l'écho fut le même. Pour y répondre et manifester le caractère ecclésial de l'envoi en coopération, l'épiscopat français crée en 1967 la Délégation catholique à la coopération (DCC). Le Service de coopération au développement (SCD) naît, quant à lui, en 1979 de la fusion de deux associations plus anciennes d'envoi de jeunes laïcs.

 

Les communautés nouvelles vont ensuite participer, elles aussi, à cet effort. La communauté de l'Emmanuel fonde par exemple Fidesco, qui envoie des coopérants en lien avec les Églises des pays du Sud. L'encyclique Fidei donum eut également des résonances dans la vie contemplative, suscitant une dynamique de fondation de dizaines de monastères en Afrique, mais aussi en Amérique latine et en Asie.

 

Aujourd'hui, le paysage de la mission a changé. Des prêtres, des religieuses, des laïcs volontaires continuent certes de partir, envoyés comme signes du « don de la foi » à d'autres Églises. Mais, souligne le P. Maurice Pivot, responsable de la cellule d'accueil des prêtres, religieux, religieuses étrangers en service pastoral en France, ils arrivent souvent désormais dans des Églises locales « de plein exercice ». « Ils y sont appelés à confirmer les chrétiens des autres continents dans la foi qu'ils vivent, en même temps qu'à en accueillir la vitalité », ajoute le rédacteur en chef du bulletin Mission de l'Église. 

À l'inverse, des diocèses lointains qui, il y a trente ou quarante ans, demandaient des « Fidei donum » pour favoriser la création d'un presbyterium local, envoient désormais et à leur tour des prêtres vers d'autres pays. Ainsi, le mouvement ne va plus seulement du nord vers le sud, mais du sud vers le sud et du sud vers le nord.

Des témoins inter-Églises

Le P. Michel Dujarier, longtemps « Fidei donum » au service du diocèse de Cotonou (Bénin), puis accompagnateur des prêtres français « Fidei donum » et aujourd'hui chercheur à l'Institut des sources chrétiennes, cite l'exemple de l'Église du Tchad : elle accueille actuellement 17 prêtres « Fidei donum », de 11 nationalités différentes - les trois quarts venant d'autres pays africains, mais aussi d'Amérique latine et d'Asie.

 

De même, des prêtres africains, latino-américains, asiatiques ou est-européens, dotés d'un contrat « Fidei donum » établi avec le diocèse qui les envoie et celui qui les reçoit, viennent en Europe pour participer à la vie pastorale. « Non sans parfois quelques difficultés, souvent liées aux différences dans les manières de vivre ou dans les sensibilités ecclésiales », précise Maurice Pivot.

 

« Des rencontres entre conférences épiscopales permettent cependant de mieux organiser les échanges, en précisant les critères et les exigences », ajoute Michel Dujarier, qui précise que dans certains cas l'arrivée de ces prêtres « risque aussi de masquer les carences et de freiner la recherche d'un renouvellement de la pastorale dans certains diocèses »…

 

Ces difficultés ne remettent pourtant pas en cause l'importance de ces témoins inter-Églises. Comme le résume Michel Dujarier, « les Fidei donum sont des prêtres sans frontières, qui permettent aux diocèses de s'ouvrir à la mission universelle et d'en donner des signes visibles ».

FD | L’histoire de Fidei Donum : Des prêtres diocésains au service des Eglises du monde

Par Edwin Gwerder

 

Fidei Donum engage des prêtres, des diacres ou encore des laïcs disposant d’un titre d’engagement épiscopal. Pour un temps délimité, ils rendent service dans la pastorale d’un diocèse du tiers monde. Ils vivent la réalité de leur vocation dans un contexte très différent et sont accueilli dans le pays hôte avec grande estime. 

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Article du P. Edwin Gwerder, de la Conférence épiscopale suisse, sur l'histoire de Fidei Donum
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P.U.B. | La réception de l’encyclique Fidei Donum dans l’Ouest de la France (1957-2003)

Par Dominique BELŒIL

Docteur en histoire contemporaine

post-doctorant à l’EPHE (Ve section)

 

Le 21 avril 1957, le jour de Pâques, le pape Pie XII adresse aux évêques du monde entier « l’encyclique Fidei Donum sur la situation des Missions catholiques, notamment en Afrique1 ». Il leur rappelle que le « don de la foi » (en latin : Fidei Donum) qu’ils ont reçu doit les inciter à mettre, « pour une durée limitée », une partie de leur clergé au service des missions catholiques d’Afrique...

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La réception de l’encyclique Fidei Donum dans l’Ouest de la France (1957-2003)
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