Chers amis,
Je vous le disais déjà la semaine dernière, mais permettez moi de vous souhaitez de nouveau une très Bonne Année 2021 en ce 113e message, le premier de cette nouvelle année. Hier nous avons célébré la fête de l'Épiphanie : les mages sont arrivés dans la crèche pour apporter l'or, l'encens et la myrrhe à l'Enfant-Jésus.
Cette année, j'ai même eu la joie de pouvoir partager une galette à la frangipane (ce qui ne court pas les rues ici comme vous pouvez l'imaginer) avec le groupe de l'aumônerie des collégiens de la communauté francophone... Ma dernière galette devait remonter à 3 ans... et donc celle-ci avait une saveur toute particulière !
Un enterrement, un mariage...
Plus sérieusement, ce passage d'une année à l'autre a été marqué dans mon ministère par une sépulture difficile, celle d'une jeune fille de 17 ans, dont je ne sais pas bien comment elle est décédé (il s'agirait peut-être d'un suicide, mais le mot n'a jamais été prononcé). Ceux qui me suivent sur Facebook ont vu passer cette information rocambolesque, et ce serait drôle si ce n'était pas à ce point dramatique. En effet, j'apprends lundi qu'une jeune originaire d'Areyksat est décédée à l'hôpital. Le corps est ramené chez ses parents, mardi matin on m'appelle et la sépulture est fixée à mardi après-midi, 14h. À midi, je reçois un appel pour me dire que finalement elle a repris connaissance, et qu'on l'a ramenée à l'hôpital, qui avait déclaré son décès la veille... Ça en dit long sur l'état des services de santé dans ce pays ! J'ai frémis à l'idée qu'elle se soit réveillée déjà enfermée dans son cercueil... Malheureusement, l'espoir n'a pas été long, et elle est décédée (vraiment cette fois-ci) quelques heures après. Mercredi nous avons fait la prière pour la mise en bière, et jeudi matin nous avons célébrées les funérailles suivies de l'enterrement.
Ce décès a été l'occasion d'une conversation intéressante avec les confrères prêtres, dont certains sont encore dans une vision archaïque, et qui refusent de célébrer l'eucharistie pour des personnes suicidées... J'ai essayé de leur dire qu'un suicidé est avant tout une personne qui était en souffrance, et qu'il ne s'agit pas de punir une personne parce qu'elle souffrait, sans parler de la souffrance qu'on vient alors ajouter pour la famille entière. Le prêtre n'est pas là pour ajouter de la souffrance à la souffrance !
Que dire, que faire, pour aider des parents qui pleurent la mort de leur fille de 17 ans ? Avec en plus la barrière linguistique... L'essentiel passe alors par le regard, par le geste, la présence, l'attention, et la prière. Je suis toujours marqué par le caractère communautaire de ces rites funéraires. Avant la mise en bière, le corps est exposé sur un lit, sous l'auvent de la maison, et tous les passants peuvent le voir et venir ce recueillir, allumer un bâtonnet d'encens, une bougie... La mise en bière rassemble tous les voisins et amis, on prie, on chante... Ici, pas d'entreprises de pompes funèbres. Le menuisier fabrique le cercueil, et tout est fait ensuite par des voisins, des amis. Ce sont les villageois eux-mêmes qui s'entraident pour tout cela. C'est très beau et touchant de voir tout ce monde rassemblé, avec toujours quelques jeunes de la chorale qui viennent soutenir la prière. Le prêtre que je suis est porté par toute cette dynamique communautaire. La sépulture à l'église se déroule plus ou moins comme en France, suivie de l'inhumation (les Vietnamiens et Cambodgiens d'origine vietnamienne ne pratiquent pas la crémation, et un terrain communautaire a été acheté pour faire un cimetière il y a déjà pas mal d'années).
J'ai donc terminé cette année 2020 par une sépulture... mais j'ai commencé l'année 2021 par un mariage ! Même si tout cela fait partie de la mission, j'avoue que c'est plus joyeux de commencer ainsi la nouvelle année. J'ai eu la joie de célébrer l'union de deux jeunes, originaires chacun de deux villages dont j'ai la charge : Areyksat et Kdey Kandal. Cela a aussi coïncidé avec une prise de parole du Premier Ministre qui est venu assouplir un peu la discipline anti covid. Nous pouvons reprendre les activités avec plus de 20 personnes, du moment qu'on respecte une distance d'1,5 m. entre chacun, le port du masque, le lavage des mains...
Grâces aux moyens modernes de communication, j'ai pu participer une fois de plus mercredi soir à une "réunion" Zoom avec plusieurs confrères aumônier de différentes communautés catholiques francophones en Asie (il y avait Bangkok, Hong-Kong, Taïpei, Tokyo, Singapour, Manille...). C'est l'occasion de se partager des nouvelles, et de voir comment évolue la situation dans les différents pays, et aussi de se donner des idées les uns aux autres. Je me rends compte que la situation cambodgienne est plutôt privilégiée par rapport à de nombreux pays.
Grâce à WhatsApp, j'ai aussi eu la joie de pouvoir discuter pendant presque une heure avec un de mes confrères du Diocèse de Laval et d'avoir ainsi des nouvelles de ses différents ministères et de ce qui se vit en France. Un beau cadeau qu'il m'a fait.
Dimanche prochain, en plus de mes deux messes en khmer (7h à Areyksat et 8h30 à Po Thom) je célébrerai à Areyksat à 10h30 une messe en français pour les fidèles qui viennent habituellement aux messes du samedi soir. En ce début d'année, nous prierons avec Marie, Notre-Dame du Mékong et Reine de la Paix, pour lui confier nos vies et lui demander de nous protéger. Ce sera aussi l'occasion pour certains de découvrir ce lieu choisi par la Vierge Marie. Je suis très heureux de pouvoir ainsi faire ce lien entre mes deux missions ici. C'est une première, et nous verrons si cette première sera suivie d'autres !
À la semaine prochaine !
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