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#054 Lundi matin 30/09/2019

Pour la fête de Pchum Ben, à la pagode du Phnom Chisor.
Pour la fête de Pchum Ben, à la pagode du Phnom Chisor.

Chers amis,

 

La semaine écoulée ici au Cambodge a été marquée par la grande fête de Pchum Ben, la 2e plus importante fête de l'année dans le calendrier traditionnel, après le Nouvel An khmer. À cette occasion, il y a ici 3 jours fériés pour permettre aux gens de retourner dans leur famille. Pendant ces quelques jours, la ville de Phnom Penh connaît ainsi un calme relatif et la circulation redevient à peu près vivable !!!

 

Fête de Pchum Ben

La croyance populaire veut qu'à l'occasion de Pchum Ben les âmes des défunts reviennent au milieu des vivants. En effet, même si la foi bouddhiste veut que les âmes des morts se réincarnent après leur mort, pour certains cela n'est pas possible à cause de leur mauvais Karma (conséquences de mauvaises actions faites dans leurs vies antérieures). Ces âmes ne renaissent pas et restent prisonnières du monde des esprits. Toutefois, chaque année, Yama, le Dieu des enfers les libère pendant quinze jours, pour qu’elles puissent rechercher leurs parents encore en vie, méditer et se repentir de leurs fautes. Le dernier jour de cette période est consacré par les vivants à se souvenir de leurs défunts et à offrir de la nourriture à ceux qui restent dans le monde des esprits. De plus, c’est une bonne occasion de se recueillir et prier pour réduire l’influence du mauvais Karma de leurs ancêtres afin de leur permettre d’échapper aux tourments du monde des esprits et de se réincarner. Pchum Ben est le dernier de ces 15 jours, et son nom signifie "Se réunir pour faire des offrandes". Pendant ces 15 jours, certains ne vont aller à la pagode qu'une fois, le dernier jour, mais d'autres se font un devoir d'aller faire des offrandes et des prières dans 7 pagodes différentes.

 

Mardi dernier était aussi un jour férié, anniversaire de l'instauration de l'actuelle Constitution. J'en ai profité pour m'échapper de la ville et aller redécouvrir des lieux que j'avais visité pour la dernière fois il y a 20 : Phnom Chisor, Phnom Tamao et Tonlé Bati. Sur le Phnom Chisor (en khmer "phnom" signifie colline) se trouve un temple de style angkorien, à côté duquel a été construite une pagode et un monastère. En ce jour férié, nombreuses étaient les familles à faire l'ascension de la colline avec armes & bagages pour aller faire des offrandes et faire ensuite un pique-nique en profitant de la vue magnifique qu'on a du haut du Phnom Chisor (cf. ci-dessous)

La pleine cambodgienne vue du sommet du Phnom Chisor.
La pleine cambodgienne vue du sommet du Phnom Chisor.

Je n'ai fait que passer au Phnom Tamao, qui abrite l'un des rare parc zoologique du Cambodge, pour ensuite aller à Tonlé Bati. C'est un site qui abrite là aussi un temple angkorien avec à proximité une base de loisirs où les Cambodgiens, en particulier les habitants de Phnom Penh, aiment à passer les jours fériés ou les jours de repos, car ce n'est pas très loin de la ville. On y trouve une quantité de restaurants et d'activités diverses. J'étais en repérage dans la perspective de la visite prochaine de mes parents, de mon frère aîné et de son épouse.

 

... et du côté de l'Église catholique ?

Dans un souci d'inculturation et pour permettre aux familles "mixtes" (ayant des membres bouddhistes et des membres catholiques) de se retrouver autour de cette grande fête, l'Église du Cambodge a obtenu l'autorisation du Saint Siège de déplacer la fête liturgique de la Commémoration des Fidèles Défunts (normalement célébrée le 2 novembre) à la date du Pchum Ben (qui change tous les ans, car elle est fixée en fonction du calendrier lunaire). Ainsi nous avons gardé ici la fête de la Toussaint au 1er novembre, mais la Commémoration des Fidèles Défunts est célébrée fin septembre, début octobre, en fonction de la date de Pchum Ben. Dans mes deux paroisses, j'ai donc célébré ce week-end la messe pour les défunts, samedi matin à Areyksat et dimanche matin à Po Thom. À cela c'est ajoutée la messe francophone samedi après-midi à St Joseph de Phnom Penh, et la messe du 26e dimanche du temps ordinaire à Areyksat dimanche après-midi... Quatre messes en deux jours, avec trois homélies différentes (deux en khmer et une en français)... une semaine bien occupée !

 

La fête de Pchum Ben est généralement l'occasion pour les paroisses catholiques de faire un geste fraternel à l'égard des personnes en difficulté (chrétiennes ou non). À Areyksat, cela a pris la forme d'une visite à domicile avec distribution de riz, de nouilles et de lait concentré. À Po Thom, cela se fait sous forme d'une distribution : nous avons offert 20 kg de riz et une caisse de nouilles instantanées à 70 personnes ou familles des environs (30 du village de Po Thom, 30 du village de Kdey Kandal, 10 du village de Tasko). Ici la pratique habituelle veut qu'on prennent une photo avec chaque personne qui reçoit son don, ce qui ne me met pas toujours très à l'aise, car même si la plupart des personnes semblent très heureuse de poser, certaines semblaient un peu gênées... on verra ce qu'on pourra faire à ce sujet... Mon rôle dans ces distribution est d'abord financier, puis honorifique ! En effet, je dois fournir l'argent pour acheter ce que nous offrons, et comme prêtre responsable, il me revient l'honneur de présider à la distribution. Le choix des personnes à aider est fait par le comité de solidarité de chaque paroisse, car ce sont eux qui connaissent les gens et leur situation. C'est une question très délicate, car cela peut créer des jalousies... "pourquoi lui et pas moi" ! Avant de faire la distribution, en accord avec le conseil pastoral, j'ai bien expliqué que lors de la prochaine distribution, nous aiderons d'autres familles... Ce genre d'opération est généralement mené 2 ou 3 fois par an.

 

En amont, nous sollicitons les fidèles, et un tronc est mis à leur disposition, pour qu'ils puissent aider financièrement à l'achat des marchandises... mais les moyens des fidèles de Po Thom, Kdey Kandal et Tasko sont très limités, et ne peuvent pas couvrir le coût. En fait, nombreux sont les fidèles qui sont dans une (très) grande précarité et qui sont plutôt du côté des bénéficiaires que du côté des donateurs. Il y a notamment une grande vulnérabilité des personnes âgées, pour lesquelles aucun système de retraite n'existe, ni aucune sécurité sociale.

 

La matinée à Po Thom s'est déroulée de la manière suivante : messe, suivie d'un temps de prière au Tiédèy (le colombarium où sont déposées les urnes funéraires) où chacun est venu déposer un bâtonnet d'encens, puis distribution aux familles, et enfin déjeuner partagé avec ce que les uns et les autres avaient apporté (et qui ont été apporté à la procession des offrandes). Ci-dessous, quelques images de tout cela...

 

Voilà pour aujourd'hui ! À la semaine prochaine !

 

P.S. : j'ai envoyé cette semaine ma 3e lettres d'information à ceux qui sont abonnés. Merci de vérifier vos boîtes mail (pour être sûr qu'elle n'est pas dans les spams) !