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#011 Lundi matin 3/12/2018

Une nouvelle semaine vient de s'écouler, marquée comme les précédentes par les heures passées à étudier la langue khmère avec mes deux professeurs, Lokru Sok et Néakru Sreymey(1).

 

Outre les cours et le travail personnel, la semaine a aussi été marquée pour moi par une célébration eucharistique, totalement improvisée, partiellement en khmer et partiellement en anglais, ainsi que par deux mariages dans la paroisse.

 

Et ici comme dans le monde entier, c'est aussi ce week-end que nous sommes entrés dans le temps de l'Avent, ce chemin qui nous emmène vers Noël... ma petite crèche cambodgienne (ci-contre) va est en place... Avec Marie et Joseph, j'attends la venue du Seigneur de l'Univers qui s'est fait homme en la personne d'un tout petit enfant...

Messe en khmer et en anglais

Mercredi soir de la semaine dernière, je me rendais comme d'habitude à la sacristie pour concélébrer la messe de 18h15... je croise alors Paul, notre tout jeune diacre, qui me dit qu'il n'y a pas d'autre prêtre que moi (M. le Curé est en Thaïlande pour quelques jours de rencontre des responsables de leur société missionnaire, et le P. Charles est comme tous les mercredis dans une autre église de la paroisse)... Donc soit je célèbre, soit il n'y a pas de messe...

 

Donc en 5 minutes nous préparons avec les fidèles une messe "internationale" : tout ce que je suis capable de dire en khmer sera en khmer, et pour le reste, je le dirai en anglais... bien entendu, les chants et les lectures, ainsi que l'évangile, seront en khmer, grâce à la présence du diacre. Je commence donc en khmer, jusqu'à la liturgie de la Parole. Après l'évangile, je poursuis en anglais, jusqu'au Notre Père que nous disons tous ensemble en khmer... encore un peu d'anglais, puis la bénédiction finale et l'envoi en khmer...!

 

Les gens avaient l'air heureux de cette solution... et pour moi c'était beau de pouvoir ainsi peu à peu prendre ma place. La solution a l'air d'avoir convenu à mon curé puisque ce lundi et demain mardi, comme il y a une rencontre pour les prêtres en responsabilité dans le diocèse, il m'a demandé de refaire la même chose...!

 

Deux mariages...

Il semble bien que cette période soit au Cambodge la grosse saison des mariages. En effet, les températures sont généralement plus clémentes (même si cette année, elles tardent à baisser), et il n'y a plus de pluies. Ce samedi 1er décembre, le P. Chatisraï, mon curé, avait donc deux mariages. Au Cambodge, dans l'Eglise catholique, il y a deux manières de célébrer les mariages. La première, c'est la célébration selon le rituel romain du mariage, comme en France par exemple. La deuxième, c'est une célébration qui, en reprenant dans le rituel romain tout ce qui est nécessaire pour la validité du mariage, reprend plusieurs gestes et symboles de la célébration khmère traditionnelle. Ce samedi, j'ai eu la chance de pouvoir vivre ces deux types de célébration.

 

Le premier mariage concernait deux familles cambodgiennes aisées (les pères des mariés sont tous les deux haut placés dans l'administration), une famille catholique et une famille bouddhiste. Le mariage chrétien avait lieu le samedi matin, et la cérémonie bouddhique avait lieu le dimanche matin, avec le grand repas le dimanche à 17h00. C'était comme l'un de nos mariages français dans la "bonne société" : on met les petits plats dans les grands, on pense au moindre petit détail, et on ne regarde pas à la dépense, car on a les moyens ! Je retiens surtout que les jeunes mariés ont l'air de beaucoup s'aimer et d'être vraiment très complices, c'est l'essentiel. La jeune mariée fait partie de la chorale paroissiale, aussi la chorale était là pour embellir la cérémonie. Après la célébration du matin, la famille de la mariée a donné un repas pour tous les paroissiens présents... tout le monde à table pour déjeuner à 10h45 !

 

Le deuxième mariage était en beaucoup plus petit comité, et il semble bien que les familles étaient plus modestes. Là aussi, comme c'est le cas pour la plupart des mariages ici, l'une des familles est catholique (celle du garçon) et l'autre est bouddhiste. Ils ont fait le choix de n'avoir qu'une seule célébration, avec la possibilité qu'offre ici l'Eglise catholique d'incorporer dans la célébration chrétienne des gestes symboliques de la célébration traditionnelle. Il s'agit en effet d'utiliser les symboles qui parlent à tous, dans la mesure où ils peuvent sans difficulté être christianisés. Je ne maîtrise pas encore tout, mais il s'agit surtout de gestes de bénédictions qui sont fait par tous les membres du premier cercle familial et le(s) prêtre(s).

La célébration se déroule donc comme toute célébration du sacrement de mariage sans eucharistie, jusqu'à l'échange des consentements, l'échange des alliances et la bénédiction nuptiale. Ce n'est qu'après que nous avons les rites complémentaires, qui sont tous des rites de bénédiction des nouveaux époux et de prières pour le bonheur et la prospérité du nouveau couple.

Bougies : le prêtre allume trois bougies (pour la Trinité) qui vont passer de main en main et tourner trois fois autour des nouveaux époux.

Liens : Les nouveaux époux prennent dans leurs mains une épée, qui symbolise la protection du nouveau foyer, et tous les proches viennent à tour de rôle nouer autour du poignet du marié et du poignet de la mariée un petit lien en coton rouge, préalablement plongé dans l'eau bénite. En nouant ce petit lien, chacun dit aux mariés la prière, les vœux qu'il formule pour eux (et bien sûr, chacun pose pour la photo après cela !). C'est beau et touchant de voir ainsi les parents, grands-parents, frères et sœurs des nouveaux époux s'avancer vers eux et leur dire personnellement la prière qu'ils formulent pour eux.

Fleurs : Puis le prêtre prononce une prière qui s'adresse au Père, puis au Fils, puis au Saint-Esprit. Et pendant cette prière, à trois reprise, toutes les personnes présentes jettent des pétales de fleurs et des petites fleurs de jasmin sur les nouveaux mariés, pour les bénir. Ce rite est aussi présent dans la célébration "romaine" (vous voyez les fleurs par terre sur l'avant-dernière photo ci-dessus).

Après cela, nous avons la signature des registres et c'est la fin de la célébration !

Deux mariages

Dîner de mariage

Dimanche soir, j'étais donc invité par la grand-mère de la mariée au dîner officiel du mariage du samedi matin. Pour l'occasion, les familles avaient loué un pavillon dans un centre de congrès et d'exposition qui, en cette saison, est occupé par les mariages. Il y avait en même temps que nous au moins 5 ou 6 autres mariages.

Dans un repas de mariage cambodgien, quand vous recevez une invitation, il y a à l'intérieur une petite enveloppe. Quand vous arrivez au dîner, vous donnez votre enveloppe, avec à l'intérieur votre contribution financière : tout cela est comptabilisé et noté dans un registre. Si jamais les parents des mariés sont invités à leur tour à un mariage, ils devront donner au moins autant que ce que les parents des mariés du jour avaient donné au mariage précédent... Les prêtres, nous sommes "exclus" de ce système !

La noce en question, puisqu'elle rassemblait les invités de deux familles "en vue" était grandiose ! Sur l'invitation il était indiqué 17h00... mais on peut arriver plus tard. A l'arrivée, les jeunes mariés vous accueillent à l'entrée de la salle et vous posez avec eux pour la photo. Ensuite, vous entrez, le cas échéant vous donnez votre enveloppe, puis vous allez une table. Et là, les serveurs apportent les plats petit à petit. Quand nous avons commencé à manger, certains des invités repartaient car ils étaient arrivés à 17h00, et nous vers 18h30 ! Ce qui fait que les familles peuvent inviter plus de personnes qu'il n'y a de place dans la salle. On m'a dit que pour ce mariage, il y avait peut-être plus de 1500 invités ! Mais nous étions peut-être dans une salle de 500 places... Décoration florale, orchestre, armée de serveurs, plats qui se succèdent, boissons à volonté (essentiellement sodas et whisky)... et vers 20h00, après que la mariée soit aller une fois de plus se changer, les mariés font leur entrée dans la salle de banquet, sous les lancés de pétales de fleurs !

Après, il y a la danse, mais là, nous étions déjà repartis !

Dîner mariage

Note :

(1) "Lokru" est le titre qu'on donne à un enseignant, et "Néakru" est le titre qu'on donne à une enseignante.